vendredi 26 avril 2019

Lyon-Turin un projet de tunnel devenu inutile

 Mardi 23 avril, j'accompagnais Yannick Jadot dans la Vallée de la Maurienne autour de deux thèmes : l'énergie hydraulique et les transports, des sujets européens et nationaux importants. Vieux de plusieurs décennies, le projet de tunnel ferroviaire (57,5 km) Lyon-Turin vise à réduire les transports de marchandises en camion au profit du rail. Que constate -t-on sur le terrain ?
C'est la logique du fait accompli, il n'y a pas d'autorisations, les financements ne sont pas acquis, mais sous prétexte d'études les élus avancent la construction du début du tunnel, ils veulent aller assez loin pour qu'il n'y ait pas de retour en arrière possible. Ces méthodes génèrent un gaspillage énorme d'argent publique, englouties en amont des prises de décisions démocratiques et économiques.
Alors nous sommes allés voir du côté de la ligne ferroviaire existante du Mont-Cenis, ou un milliard d'euros a d'ors et déjà permis de rénover totalement cette ligne pour la rendre parfaitement opérationnelle. Nous y avons écouté la démonstration magistrale de Jean-François Roussel, ancien chef de la gare de Modane à la retraite et ex membre de la direction de la SNCF nous expliquer que dans les années 80, 150 trains circulaient par jour alors que la voie était unique, avec un contrôle douanier, sans informatique et qu'il fallait changer de locomotive parce qu'on changeait de pays. Revenir à ce niveau est possible et dépassable tout de suite et éviterait un million de camions par année sur la route. C'est à dire qu'on peut d'ors et déjà supprimer les 2/3 des camions qui traversent les Alpes par le Fréjus routier. 
Témoignage ancien chef de gare de Modane
Pourtant quasiment aucun train ne passe. La SNCF n'affrète pas les trains, ne met pas le personnel nécessaire en gare de Modane. Quand les camions arrivent à la plateforme d'Aiton pour prendre le train, s'ils doivent attendre le train trop longtemps, ils prennent le tunnel routier plutôt que ferroviaire.
Nous nous rendons au tunnel routier du Fréjus et que constate-t-on sur place ?
Juste derrière nous se trouve une remorque GEODIS Group, filiale de la SNCF immatriculée en 73, tractée par un camion Tchèque. Skizophrénie totale, l'argent publique a financé la rénovation d'une ligne SNCF, que la SNCF elle même n'utilise pas, mais fait travailler des entreprises tchèques qui passent par le tunnel routier...
Deuxième constat, la galerie de sécurité devient  une voie de circulation, qui permettrait le passage de 8.000 poids lourds par jour, « même si le préfet dit qu’il n’y en aura pas plus de 4.000, ce qui fait tout de même deux fois plus qu’aujourd’hui ».  « Sortir les camions de ce tunnel, c’est amplifier sa faillite », estime Daniel Ibanez. Pour Karima Delli, présidente de la commission transport au parlement européen, « les camions, c’est sur le rail, ras-le-bol des investissements dans le tout-routier ».
« Ce projet doit s’arrêter […] On ne peut pas aujourd’hui, pour répondre aux 67 000 morts prématurés en France liés à la pollution de l’air, dépenser 26 milliards d’euros. Ce que demandent même les routiers, ce que demandent les associations, et ce que nous demandons, c’est l’utilisation pleine et entière d’une ligne qui existe, qui est parfaitement en état et qui créerait de l’emploi à l’échelle locale », a affirmé Jannick Jadot, tête de liste Europe Ecologie les Verts, pour les élections européennes.
Cet exemple du projet du Lyon-Turin, montre que l'on privilégie toujours dans ce pays, le transport routier, la pire des  solutions en matière de transport et de pollution de l'air.  Ici, on tranfère la pollution de la vallée de l'Arve vers la Maurienne à coup de milliards. 
Pour se faire une idée 26 milliards € = 30 fois l'aéroport de Notre Dame des Landes.
Le tunnel de base est pensé pour 40Mt de marchandises par an. Aucune des prévisions ne se vérifie. Depuis 1998 le fret marchandises Fréjus + Mont-Blanc + Mont-Cenis baisse !
Ici, on creuse dans la dette publique, on assèche les sources naturelles, les drainages du tunnel de base entre 60 et 125 millions de mètres cubes d’eau par an. Tout cela est irréversible !
On constate déjà la masse des déblais  : 1,2 Million de M3, sur plus de 20 mètres de haut, pour 8 kms forés la. Pour le tube transnational il faudrait forer 2 x 57,5 kms ... calculez combien de Millions m3 déblais seraient dispersés en Maurienne.
Le chantier du Lyon-Turin ferroviaire, c’est le désertification des zones d’activité. Nous avons également visité une scierie qui subit une procédure d'expropriation, elle est la dernière entreprise à résister. 
Ce combat n'est pas perdu car le financement n'est pas trouvé et ne sera jamais rentable. Même des hauts fonctionnaires contestent cette aberration financière et écologique. La priorité aujourd'hui c'est le fret ferroviaire sur l'ensemble du territoire français qui est très très en retard car il recule depuis des décennies. Il faut construire le transfert modal des camions sur les trains bien avant Aiton, dès la plateforme d'Ambérieu, qu'il est possible d'agrandir, pour la région, dès la région parisienne, dès les pays du nord de l'Europe. Globalement le fret baisse, et continuera de baisser avec la relocalisation de l'économie alors limitons le transport des marchandises pour pouvoir continuer à faire circuler les hommes.

 




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